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Le classement des fictions sur l’école...

lundi 16 juillet 2012, par Greg

Notre appel ne précisait pas que les "livres essentiels sur l’école" se devaient d’être des essais... De nombreuses fictions ont été proposées, en voici la liste :

1 - Jan Guillou, La Fabrique de la Violence

Roman traduit du suédois par Philippe Bouquet

Erik a 14 ans et toute sa vie, à l’école comme à la maison, se construit dans la violence. Jan Guillou a nourri ce récit de son expérience de collégien, quand, au nom de l’éducation mutuelle, les élèves les plus âgés brutalisaient les plus jeunes. Il dénonce un système éducatif fondé sur la loi du plus fort invitant à une réflexion sur l’inculcation de l’ordre social et la destruction de toute révolte que portent en eux les programmes d’éducation de nos démocraties. Au centre du roman se trouvent ainsi la vengeance et le pardon ; mais aussi l’amitié, la fraternité et la solidarité.

Jan Guillou est né en 1944 en Suède. Devenu journaliste pour payer ses études de droit, il publie un reportage sur l’école évoquée dans La Fabrique de violence. Le scandale est tel que le gouvernement suédois ordonne la fermeture de l’établissement. Quelques années plus tard, en 1973, il enquête sur les activités d’un bureau de renseignement pratiquant le fichage de citoyens suédois au profit de la CIA. Suite à ces révélations, il sera condamné pour espionnage à dix mois de prison.
Jan Guillou est également l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages (traduits en une vingtaine de langues), parmi lesquels une série de romans d’espionnage, Coq rouge, et la trilogie d’Arn le Templier (Agone, 2007 & 2008) qui ont connu un immense succès populaire en Suède. Ses romans et ses écrits journalistiques sont marqués par des prises de positions à contre-courant, notamment vis-à-vis de la politique intérieure de son propre pays.

2 - Allan Silitoe, La solitude du coureur de fond

« Dès mon arrivée à la maison de correction, ils ont fait de moi un coureur de fond. Ils ont probablement pensé que j’étais fait pour ça parce que j’étais grand et maigre pour mon âge (et j’ai pas changé), et en tous cas ça m’a pas beaucoup gêné, pour vous dire la vérité, parce que la course, ça a toujours été bien vu dans la famille, surtout quand il fallait courir avec la police aux fesses. J’ai toujours été bon à la course : bonne vitesse, bonne foulée, le seul ennui, c’est que j’ai beau courir vite et j’allais à toute blinde, vous pouvez me croire sur parole, mais ça m’a pas empêché de me faire piquer par les flics après le coup de la boulangerie ».

Dans un centre de redressement en Angleterre, Colin Smith se distingue par ses qualités de coureur de fond. Pendant les longs parcours d’entraînement en forêt, il songe à sa vie passée, sa famille, son camarade, son amie – au vol qui l’a conduit dans ce Borstal. Le jour de la course de l’école, il s’arrête délibérément devant la ligne d’arrivée, refusant de jouer le jeu de l’institution.

Le livre a fait l’objet d’une adaptation au cinéma par Tony Richardson en 1962. Il est également disponible en DVD.

3 - Sapphire, Push

La sortie de « Precious » de Lee Daniels (Shadowboxer) est l’occasion parfaite de rendre hommage au livre dont est tiré le film. Push de Sapphire, est un chef d’œuvre d’écriture, moderne et poétique, engagé mais jamais pathétique. Sapphire est une poétesse-performeuse de Harlem, fille spirituelle d’Alice Walker et du militantisme féministe, de Toni Morrison et de la littérature noire américaine.

Les premières pages bousculent le cerveau, retournent le ventre, tordent les boyaux, annihilent tout concept de confort et de normalité. Les mots sont d’une cruauté extrême et les gestes remplis d’une violence primitive qui fait froid dans le dos. Precious se fait frapper, violer et « engrosser » par son père, maltraiter et humilier par sa mère. Élevée dans le quartier de Harlem au milieu de la crasse, de la graisse et de la misère intellectuelle, baignée dans les odeurs de maquereaux à bouffer des macaronis jusqu’à s’en rendre obèse – sous peine de se retrouver rouée de coups – Precious est mère d’une p’tite « mongo » et d’un p’tit Abdul. Elle se fait expulser de son école avant de se retrouver dans un « Établissement d’Enseignement Parallèle : Apprendre de Chacun. Apprendre à Chacun ». Blue Avers, l’institutrice de Precious, va lui apprendre à lire, à écrire et à revivre au milieu de grosses black aussi paumées et désillusionnées que l’adolescente. Precious va se libérer et se révéler aux travers de la poésie. Les premiers vers ne sont que des successions de consonnes attachées les unes aux autres, des sons aux airs de syllabes. Les lettres illisibles se transforment en mots puis en poèmes, des cris pas si haineux que ça. Jamais inquisiteur et bien loin du pathos qu’évoque l’inceste, Sapphire vous attrape pour ne plus vous lâcher. Chacune des réflexions est une bouffée d’oxygène qui, bizarrement, ne met pas mal à l’aise. C’est tout l’art de ce roman, une histoire cauchemardesque de laquelle Sapphire nous éloigne pour nous plonger dans le cœur d’une héroïne digne, lucide, vraie, qui n’abdique jamais, et n’attise pas la pitié. Un de ces bijoux littéraires qui n’est pas près de vous quitter…

4 - Jules Vallès, L’Enfant , Le Bachelier et L’Insurgé

"A TOUT CEUX
qui crevèrent d’ennui au collège ou qu’on fit pleurer dans la famille, qui, pendant leur enfance, furent tyrannisés par leurs maîtres ou rossés par leurs parents ; Je dédie ce livre."
Jules Vallès

Fils d’un professeur de collège méprisé et d’une paysanne bornée, Jules Vallès raconte : "Ma mère dit qu’il ne faut pas gater les enfants et elle me fouette tous les matins. Quand elle n’a pas le temps le matin, c’est pour midi et rarement plus tard que quatre heures."Cette enfance ratée, son engagement politique pour créer un monde meilleur, l’insurrection de la Commune, Jules Vallès les évoqua, à la fin de sa vie, dans une trilogie. La langue de Jules Vallès est extrémement moderne. Pourtant l’histoire de Jacques Vingtras fut écrite en 1875 et c’est celle des mal-aimés de tous les temps !

Le bachelier

"A CEUX
qui nourrit de grec et de latin sont mort de faim ; je dédie ce livre."
Jules Vallès

Jules Vallès, jeune bachelier, ne trouve pas de travail pour une raison simple : "J’ai dix ans de colère dans les nerfs, du sang de paysan dans les veines, l’instinct de révolte... ne voyant la vie que comme un combat, espèce de déserteurs à qui les camarades même hésitent à tendre la main, tant j’ai des théories violentes qui les insultent et qui les génent ; ne trouvant nulle part un abri contre les préjugés et les traditions qui me cernent et me poursuivent comme des gendarmes."

Dans ce deuxième volume autobiographique, Jacques Vingtras le réfractaire manifeste au Quartier latin, échafaude avec ses amis mille projets révolutionnaires. L’écriture est enflammée, pleine d’humour. La commune se profile à l’horizon. En attendant il faut vivre : il sera pion.

L’Insurgé

"A TOUS CEUX
qui, victimes de l’injustice sociale, prirent les armes contre un monde mal fait et formèrent sous le drapeau de la Commune, la grande fédération des douleurs, Je dédie ce livre."
Jules Vallès

Toute la vie de Vallès est tendue vers la Commune. Lorsque les insurgés s’emparent de Paris, il devient maire du XIXème arrondissement. Le lendemain de l’insurrection, il est condamné à mort par contumace. Son le Cri du peuple, est interdit. Dans ce troisième volume autobiographique, l’auteur montre son héros, Jacques Vingtras, sur les barricades, dans le feu de l’action, au milieu des morts et des bléssés. Son écriture rapide, sa vision fulgurante des scénes de combat, font de ce livre le cri de la Commune. Jules Vallès mourut épuisé, à cinquante-trois ans, en murmurant : "J’ai beaucoup souffert."

5 - Emilie Carles, Une soupe aux herbes sauvages

Merveilleux récit autobiographique montagnard d’une institutrice en bute aux parents d’élèves qui viennent les retirer de la classe quand les travaux des champs se font pressants !

La biographie d’Emilie Carles n’a rien d’un conte de fées. Sa vie a été une longue succession de joies, de peines, de travail, de lutte… pour assurer la subsistance des siens, défendre un cadre de vie qu’elle adorait et mener une existence conforme à l’idéal libertaire et antimilitariste qui était le sien. Rien de bien extraordinaire dans ce parcours conforme à celui de beaucoup de gens simples, issus d’un milieu modeste, mais vigilants à ce que la loi d’airain de l’argent-roi ne piétine pas le pré-carré de leur idées. Emilie Carles est née en 1900, non loin de Briançon, au cœur d’une petite vallée appelée « la Clarée », dans un village portant le nom champêtre de « Val des prés ». Ses parents étaient agriculteurs de montagne et elle avait cinq frères et sœurs. L’exploitation ne rapportait guère mais demandait beaucoup de travail, et ses parents peinaient à gagner de quoi nourrir cette importante tablée familiale. Sa mère mourut, foudroyée en plein champ, alors qu’Emilie n’était âgée que de quatre ans, et cette disparition prématurée la marqua durement. Très vite, Emilie fut contrainte par les dures lois de l’existence à fournir une double journée de travail : à l’école d’abord, pour s’instruire, aux champs et à l’étable ensuite, pour aider la famille à survivre. Elle avait un projet, devenir institutrice, et elle témoigna d’une volonté et d’un courage hors du commun pour y arriver. « J’aimais l’école, j’aimais l’étude, j’aimais lire, écrire, apprendre. Dès que je suis allée à l’école, je me suis sentie chez moi et c’est là que je me suis épanouie. » Elle fut d’ailleurs la seule enfant de la maison à poursuivre ses études.

6 - Dominique Dayau, LIRE ? Arrête !

Une société où la lecture devient aussi illégale que la cigarette dans les lieux publics, des libraires forcés à la reconversion ou contraints à vendre les livres sous le manteau, des lecteurs désemparés et plongés dans la clandestinité…
Dominique Dayau imagine là un opuscule kafkaïen qui exacerbe le goût de l’interdit. Invitation à la lecture qui donne à refléchir sur notre monde contemporain dominé par l’image, voilà un récit singulier comme un pied-de-nez à la loi anti-tabac.

7 - Gavino Ledda, Padre padrone

Gavino Ledda est né en 1938, en Sardaigne, à Siligo (Sassari). C’est un berger sarde pratiquement analphabète et muet. Jusqu’à l’âge de vingt ans, il a vécu sur sa montagne, isolé du monde, car c’était ce que voulait son père.
Voulant s’affirmer personnellement, il s’est révolté contre l’autorité absolue de son père et a étudié jusqu’à devenir professeur de linguistique.
Dans son roman autobiographique Padre padrone, il décrit comment il s’est libéré de l’ignorance et de la solitude de sa condition de berger et du joug de l’autorité paternelle.
En 1977, les frères Taviani adapteront au cinéma ce roman avec succès et la même année Nino Frank le traduira en français et il sera publié par Gallimard.
Dans l’extrait qui suit, nous assisterons à l’amère et rapide fin de l’expérience scolaire de Gavino : après un mois d’école, son père vient le récupérer alors qu’il est dans la classe. Le motif : il a besoin de lui pour surveiller les moutons.

8 - Daniel Pennac, Chagrin d’école

Chagrin d’école’, dans la lignée de ’Comme un roman’, aborde la question de l’école du point de vue de l’élève, et en l’occurrence du mauvais élève. Daniel Pennac, ancien cancre lui-même, étudie cette figure du folklore populaire en lui donnant ses lettres de noblesse, en lui restituant aussi son poids d’angoisse et de douleur. Le livre mêle les souvenirs autobiographiques et les réflexions sur la pédagogie, sur les dysfonctionnements de l’institution scolaire, sur le rôle des parents et de la famille, sur le jeunisme dévastateur, sur le rôle de la télévision et des modes de communication modernes, sur la soif de savoir et d’apprendre qui, contrairement aux idées reçues, anime les jeunes d’aujourd’ hui comme ceux d’hier.

9 - Henry Bauchau, L’enfant bleu

 
Le parcours de Lionel (né en 1961 à Ivry) est raconté, sous le pseudonyme d’Orion, dans le livre L’Enfant bleu écrit par Henry Bauchau et publié en 2004. Ce récit rapporte le cheminement vers la création, puis l’expérience artistique qui va libérer Orion. En 1977 à Paris, Henry Bauchau, alors thérapeute au Centre psychopédagogique de la Grange-Batelière, rencontre Lionel et l’encourage à exprimer ses peurs par le dessin. Labyrinthes, monstres, îles paradis, constellations, composent le monde de Lionel. Terrifié à l’idée d’écrire et de faire des fautes d’orthographe, il exprime dans "les dictées d’angoisse" les craintes qui l’envahissent. L’exposition, pensée sous la forme d’une constellation, présente le monde onirique de Lionel, l’expérience poétique qui le lie à Henry Bauchau, dans une relation d’échange.

10- Yaël Hassan, Le Professeur de musique

Comme chaque année, Simon Klein, vieux professeur de musique, affronte la rentrée scolaire avec appréhension. Il manque d’autorité, de fermeté. Mais sa dernière année avant la retraite lui réserve plus d’une surprise. La passion d’un petit garçon pour le violon va l’aider à se délivrer d’un trop lourd fardeau.

"- Quelque chose ne va pas Simon ? s’inquiéta Bella. - C’est sidérant, vraiment sidérant ! -Quoi donc ? -Ecoute bien la fiche que je vais te lire !... Simon Klein n’en revient pas : un Choukri qui aime la musique, la grande, la " vraie ", et qui compte sur lui, le vieux professeur usé, pour la connaître mieux... cela ressemble presque à un canular ! Mais Malik Choukri veut réaliser son rêve, apprendre le violon, même s’il doit pour cela sortir M. Klein de sa triste torpeur."

À noter que le site Ricochet propose une sélection de livres jeunesses sur le thème de l’école.